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La Terre Rouge des Bienveillants
9 septembre 2012

Ce matin, je me suis réveillée en pleine forme et

Ce matin, je me suis réveillée en pleine forme et assez tôt. Après un petit déjeuner léger, devant la constatation que c’est probablement la meilleure chose à faire du temps dont je dispose ici et maintenant, je décide de m’adonner à un exercice que je sais pourtant difficile : la méditation.

J’aime l’idée de parvenir à discipliner mon esprit, non dans le but d’atteindre une certaine sagesse et encore moins un détachement mais pour atteindre des niveaux supérieurs de la conscience, un but spirituel et sensuel. Mon principal ennemi dans cette recherche, c’est moi-même, car mon esprit est tout sauf discipliné. Il accroche toutes les pensées qui passent, les jugent, les confrontent, les analysent.

La paix intérieure est donc pour moi une quête de longue haleine puisque dans ma conscience, je suis à la fois l’adulte et l’enfant, ce dernier voulant se laisser déborder par l’excès d’amour, tandis que l’autre veut juste être la meilleure personne possible, juste et généreuse. J’ai donc pris mon courage à deux mains. Ce n’est pas un combat, c’est à la rigueur un travail mais c’est surtout une entreprise pleine d’amour aussi, l’amour et l’acceptation, enfin, du Moi.

Méditer, ce n’est pas penser à rien. C’est n’accrocher aucune pensée, en accepter le passage non pas comme une intrusion mais un état transitoire, comme toute chose. Je dois essayer car c’est dans l’accueil de tout ce que je suis que se trouve ma paix.

Alors voilà. Je m’impose 35 minutes. C’est en même temps assez long pour être un défi et suffisamment court pour être réalisable. Je m’assoie donc en tailleur, je me détends le dos, bien droite, je pose mes mains sur mes genoux, je règle ma montre, et je ferme les yeux.

Au début, ma conscience est saturée des dernières images que j’ai vues. Le rideau balloté par le vent, les palmiers qui bougent. Le mouvement. Ce n’est pas forcément un mal, car si moi je ne dois pas m’autoriser à bouger, je peux projeter du mouvement, comme par exemple dans l’énergie ou l’oxygène qui circule en moi. J’essaye d’en avoir une image unique, par contre, sur laquelle je puisse me concentrer. J’imagine que ma respiration est un flot bleu qui monte de la terre vers le ciel en passant par mon bassin, mon tronc, mon cou, ma tête en expirant, et qui retourne aux fondements telluriques, lorsque j’expire. C’est facile dans un premier temps, dans un premier temps seulement.

Et voilà que mon esprit est parasité maintenant. Par des pensées matérielles, les choses qui me préoccupent en ce moment, même si je n’en ai pas pleinement conscience car je suis très sollicitée.

Où vais-je loger pendant mon stage, comment vais-je gérer de rentrer en France après toute cette agitation, j’ai bien un peu soif, Aurélien arrête de me parler s’il te plaît tu ne vois pas que je bosse là, j’ai des fourmis dans le gros orteil droit, on est sensé visiter quoi cette après-midi déjà, est-ce que je suis une bonne personne, si je perdais encore trois kilos ce serait pas mal, mais ma grosse, c’est pas en mangeant du chocolat que ça arrivera, il y a un moustique sur ma main droite, le salaud il a bien choisi son moment, merde je viens de bouger un doigt, c’est comme ça que tu médites, eh bien dis donc, c’est réussi, est-ce que je suis en train de méditer si je réfléchis au sens de cette méditation, c’est peut-être mieux que rien, non, je ne sais pas.

Tout à coup, quelque chose d’étrange se passe. Il y a une boule d’énergie devant moi, juste devant ma poitrine. Je ne la vois pas, je ressens juste la force avec laquelle elle repousse mon corps vers l’arrière et mes membres vers l’extérieur. Cette sensation me fascine et je n’ai aucun mal à me concentrer sur elle. Je ne vois même plus le noir de mes paupières. Je n’ai plus qu’un seul de mes cinq sens, j’ai choisi le toucher, et je suis une surface d’échange entre moi et cette force dont je commence à percevoir la présence.

Il est 8h23. Comment je le sais ? Aucune idée. Je n’ai même pas la curiosité d’ouvrir les yeux pour vérifier. Pas tant parce que cela briserait mon éveil mais surtout parce que je n’ai pas besoin de vérifier. Il est 8h23, c’est tout.

Il y a d’autres choses que je sais, sans comprendre comment. Quelque chose flotte près de moi, qui me protège des agressions extérieures. Je prends plaisir à être ancrée dans l’instant. Je me sens capable de rester très longtemps ainsi, car c’est juste vivre, ce n’est pas si difficile. Et ce, même si j’ai mal au dos je crois, mais je ne le sens pas, j’ai mal à la jambe droite aussi, enfin mon cerveau essaye de me dire des choses, mais ce sont comme des cris étouffés par un mur anti-bruit. Cause toujours, corps, tu m’intéresses. Ma colonne me dit, uniquement dans un souci de perfection, que mon dos n’est pas exactement droit. Je penche un peu à gauche mais il n’y a qu’en restant immobile aussi longtemps qu’on peut le percevoir. Bon, je m’en remettrai. Je sais qu’il est 8h32.

Ma peau est si offerte à l’air, si sensible, que je sens le vent qui vient de la fenêtre. Je visualise ce souffle et c’est lui, mon amour, mon Aurélien, qui me caresse dans le cou. En temps normal, je me serais dit que c’était mal, cette image, que c’était malsain et masochiste. Pourquoi au juste. Je me suis même autorisée à bouger les lèvres pour sourire. J’accueille. Je sais qu’il est 8h39.


Ma montre ne devrait pas tarder à sonner pour me tirer de ma stase. C’est ainsi, les meilleures choses doivent prendre fin pour que l’on ait conscience de leur réalité. J’ai déjà hâte d’écrire à ce sujet. Je ne me suis pas autorisée à compter mais à partir du moment où j’ai su que c’était l’heure, il a dû s’écouler au maximum trois ou quatre secondes.

Bip, bip, bip. La matière, mon corps engourdi. Aïe ! Je déplie les jambes devant moi et là, eh bien, je n’arrive plus à bouger la droite. Du tout. Je la pose à terre, elle me soutient mais elle m’est aussi étrangère que si c’était une prothèse en bois. Je la masse pendant dix, quinze, vingt secondes. J’ai même eu le temps de penser « et si je ne la récupérais jamais ? ». Mais si, clairement, je vais la récupérer, j’arrive à bouger un peu les orteils de nouveau. Uma Thurman dans Kill Bill, en lutte avec la matière. Le sang qui circule de nouveau dans ma cuisse, ma jambe, mon pied, je ressens tout. Ça fait un mal de chien ! Note pour plus tard : choisir une position plus adaptée, surtout si je compte tenir plus longtemps. Mais bon sang, que je me sens vivante !

L’après-midi, je me balade avec Angelo sur le bord de mer. Un peu comme avec Soddy, j’ai tout de suite accroché avec ce petit bout d’homme. Nous sommes devenus très complices.

Ce voyage est en train de profondément me changer.

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